L'autodétermination

Publié le 29 octobre 2024 à 17:33

Aux origines de l’autodétermination

Première utilisation du terme en1683 dans l’Oxford English Dictionary : « détermination de l’esprit ou de la volonté d’une personne par elle-même envers un objet ».

1911 : « l’action d’un peuple qui décide de sa propre forme de gouvernement ».

« Détermination de ses actes ou de ses états par soi-même sans contrainte extérieure ».

« Détermination de son propre destin ou de sa propre ligne de conduite sans contrainte ; libre-arbitre ».

Selon Wehmeyer le concept d’autodétermination puise sa source dans les recherches sur le libre arbitre et l’action volontaire, puis celles de la motivation et de la personnalité.

Pour Nirje (1972) l’autodétermination articule le droit des personnes avec un handicap à vivre une vie autodéterminée et le besoin d’adapter un environnement leur permettant de prendre leurs propres décisions pour vivre de manière plus indépendante.

Deci et Chandler (1986) pensent que la théorie de l’autodétermination (TAD) peut aider les enseignants à motiver les étudiants avec des difficultés d’apprentissage en proposant des tâches stimulantes et en favorisant l’autonomie.

En 1990 l’autodétermination était pensée comme moyen pour permettre aux personnes présentant ou non des incapacités, d’obtenir de meilleurs résultats dans leur passage à la vie adulte (Shogren et al., 2017).

Avec le modèle du développement humain et du processus de production du handicap (MDH-PPH, Fougeyrollas, 2010), l’accent est mis sur la responsabilité de l’environnement dans la production du handicap. Aujourd’hui on prend en compte le rôle de l’amélioration des compétences personnelles et l’adaptation de l’environnement.

L'autodétermination, de quoi parle-t-on ?

L’autodétermination c’est agir « avec conviction en fonction de son propre esprit ou de sa propre volonté, sans contrainte extérieure exagérée dans le but de déterminer son destin, sa ligne de conduite. »

« Déterminer son destin, le cours de sa vie, sans coercition. »

Importance de ne pas confondre autonomie et autodétermination. L’autonomie étant la capacité à agir seul sans aide extérieure (autonomie/dépendance). L’autonomie est une des 4 composantes de l’autodétermination

Les différents modèles de l’autodétermination

 Quatre modèles conceptuels prédominants ont été théorisés. Ces quatre modèles se distinguent, par leur perspective et leur complémentarité à étudier, décrire, comprendre et promouvoir l’autodétermination de manière multidimensionnelle.

théorie de l’autodétermination (TAD) :

Développé dans les années 80, par 2 psychologues américains, Edward Deci et Richard Ryan. À partir d’une recherche sur la motivation et les effets de récompenses intrinsèques et extrinsèques, cette théorie part du principe que tous les êtres humains, quelle que soient leurs caractéristiques, possèdent 3 besoins psychologiques fondamentaux et innés :

- Le premier est celui d’autonomie qui consiste à agir à partir de ses intérêts, préférences et valeurs propres. Ce besoin est satisfait lorsqu’un individu fait l’expérience du choix et de la volonté dans son action, et se perçoit comme étant à l’origine de ses actions.

- Le second est le besoin d’appartenance sociale. Il correspond au besoin de se sentir aimé, accepté, de faire partie d’un groupe. Il se traduit par une satisfaction qui vient d’un sentiment de connexion avec les autres ; prendre soin et être pris en charge par les autres.

- Le troisième besoin est celui du sentiment de compétence qui se traduit par la perception de se sentir capable, efficace.

Les environnements qui soutiennent ces besoins favorisent un développement positif, tandis que les environnements sociaux qui entravent la satisfaction de l’un de ces besoins engendrent passivité, aliénation et mal-être.

C’est à partir de la satisfaction de ces 3 besoins fondamentaux que les psychologues Deci et Ryan ont développé leur théorie de l’autodétermination.

Modèle tripartite écologique de l’autodétermination :

Développé par Brian Abery de l’Université du Minnesota et Roger Stancliffe de l’Université de Sydney.

Selon eux, les individus, avec ou non des incapacités, ne souhaitent ni n’ont la capacité d’exercer un contrôle indépendant sur tous les domaines de leur vie.

L’autodétermination consiste à avoir la possibilité de décider des domaines de la vie sur lesquels un contrôle souhaite être « exercé » ainsi que du « degré de contrôle » appliqué.

Des personnes peuvent volontairement renoncer à contrôler les aspects de leur vie qu’ils ne considèrent pas comme importants.

S’il existe une correspondance entre les niveaux de contrôle souhaités et exercés, alors une plus grande autodétermination est associée aux domaines de la vie que l’individu considère comme importants.

le modèle fonctionnel d’autodétermination :

Développé dans les années 90 par Michael Lee Wehmeyer, il définit le comportement autodéterminé comme les attitudes et les capacités requises pour agir en tant qu’agent causal principal dans sa vie et pour faire des choix concernant ses actions sans influence ou interférence externe indue. L’autodétermination implique 4 caractéristiques essentielles :

- l’autonomie, capacité à faire un choix ou à l’exprimer et d’initier une action en conséquence.

SIS F évaluation.

- l’autorégulation qui permet aux individus d'examiner leur environnement et leurs possibilités de réponses afin de s'y adapter pour décider de la manière d'agir, d'évaluer la désirabilité des résultats de leur action et de réviser leur planification si besoin.

Jeu : perdus sur la lune.

- L’empowerment psychologique qui correspond à la conscience de ses propres capacités (je suis capable).

- L’autoréalisation qui est le processus dans lequel une personne apprend à tirer profit de la connaissance de ses forces et faiblesses afin de maximiser son développement personnel. Cela correspond à la connaissance de soi.

théorie de l’agentivité causale (TAC) :

Développé par Michael Lee Wehmeyer, Karrie Shogren et Susan Palmer en 2017.

Cette théorie trouve son origine dans le modèle fonctionnel mais est plus axée sur l’action.

Elle intègre :

- des connaissances des domaines de la motivation et de la psychologie positive.

- L’action volontaire dans la définition de Wehmeyer, dérivée de la TAD de Deci et Ryan, et ajoute une attention supplémentaire à l’action agentique et les croyances d’exercer du contrôle sur l’action.

Les personnes deviennent autodéterminées en définissant les actions et les croyances nécessaires pour s’engager dans une action autonome en réponse à des besoins psychologiques de base et à une motivation autonome ainsi qu’à des défis contextuels et environnementaux.

En résumé

Le concept autodétermination intègre la notion de liberté et à l’accès aux droits.

Pour les personnes accueillies en ESMS la notion de liberté se confronte à celle de pouvoir.

L’autodétermination est un équilibre entre dimensions personnelle et environnementales.

Pour pouvoir s’autodéterminer, la connaissance de soi est fondamentale. C’est le 1er levier.

Le second levier repose sur l’adaptation de l’environnement.

L’approche ne peut être qu’individuelle.

L’autodétermination regroupe l’ensemble des habiletés qui permettent à un individu d’agir directement sur sa vie sans être influencé par des personnes extérieures.

L’autodétermination se distingue de l’autonomie et ne se résume pas à l’indépendance, ni à la capacité à faire des choix.

Il s’agit de passer de la soumission à la coopération.

 

Marcel Nuss : 

« Le fait d’avoir besoin d’être accompagné implique explicitement une notion de contrainte physique et/ou mentale. Cela ne signifie pas pour autant que je sois dépendant de mes accompagnants, du moins tant que je garde mon libre arbitre. Tant que j’ai mes facultés intellectuelles, que je suis responsable de mes actes.

On peut me laisser ̏ crever̋, mais on ne pourra jamais penser à ma place, par exemple. Toute idée de dépendance à est imprégnée d’une aura d’assujettissement implicite : ̏ Puisque tu dépends de moi, tu m’es redevable d’une certaine gratitude, et j’ai un droit de regard sur toi ̋, donc un pouvoir plus ou moins tacite sur toi.»

(Marcel Nuss, La présence à l’autre, Dunod, 2014, p. 61.)

 

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